A la rencontre des familles

Publié le par carpediemisation.over-blog.com

Lors de notre séjour à Trois-Rivières, nous avons eu la chance de rencontrer plusieurs familles, fréquemment en visite à Carpe Diem, ou lors de groupes d’entraide mais aussi d'autres qui accompagnent leurs proches en centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) après avoir vécu à Carpe Diem (CD). L’occasion de mieux comprendre comment se décline l’approche en amont et en aval de l’hébergement et de découvrir l’implication de l’entourage.

Rencontre avec Raymond D.
à propos de l'accompagnement proposé par CD, de l'intérêt des groupes d'entraide, de son implication à la fondation.

 


 

Rencontre avec Chantal G.
à propos de Carpe Diem, de l’implication des familles, de la transition de la Maison CD vers un centre d’hébergement, de la belle initiative du comité des familles.

 

 

De l’apprivoisement : écoute, respect, accompagnement ajusté au parcours de la personne et de son entourage
Chaque témoignage recueilli aborde la manière singulière dont l’équipe de CD fait preuve pour accompagner les personnes et leur entourage selon leur rythme, cette « facilité dans le respect de la personne ». Les premières prises de contact se font bien souvent au domicile avec une des intervenantes auprès des familles, qui de manière conviviale fera la connaissance avec la personnes et ses proches et répondra au mieux aux questions et aux besoins de répit des proches. L’entourage apprécie particulièrement le soutien proposé par CD, cette disponibilité quotidienne et l’écoute primordiale à l’accompagnement de leur proche. Des cheminements accompagnés face aux questions délicates comme « quand est le temps de l’hébergement ? » et le soutien offert au conjoint qui « se retrouve tout seul à la maison ». Pour la fille de Monsieur D., dès les  premiers contacts établis avec l’équipe de CD, elle s’est sentie « accueillie dans sa peine », les démarches ont été entreprises dans le respect du rythme de son père, de sa mère et le sien évidemment :« rien n’était tracé à l’avance », tout était à ajuster.

De l’importance du répit : hébergement temporaire, centre de jour, groupes d’entraide, accompagnements individuels
Après quelques rencontres à domicile, Madame D. a découvert CD par le biais du centre de jour (équivalent accueil de jour). L’occasion de se familiariser avec la maison, les résidents, de tisser des liens de confiance avec les intervenants. Puis elle venue en séjour temporaire de fin de semaine régulièrement avant d’accepter de venir y vivre quotidiennement. Avec le recul de son expérience, Monsieur D. proposerait le même accompagnement à son épouse mais serait plus vigilant à ses propres besoins de répit. A propos des groupes d’entraide, M. D. qui a accompagné son épouse pendant une dizaine d’années évoque le précieux soutien de ces réunions mensuelles. Il y participe depuis 7 ans dans un groupe qui s’est naturellement constitué, celui des conjoints. Des problématiques propres aux conjoints y sont abordées, il est alors fait appel à des professionnels pour traiter des questions autour de la sexualité par exemple . Avec Monsieur E., un lien particulier s’est tissé avec un intervenant autour du bricolage, il lui a proposé tout d’abord de venir l’aider à la maison CD puis, Monsieur E. est venu progressivement au centre de jour pour ensuite venir en hébergement temporaire d’une à trois journées par semaine ; Monsieur E. ayant pris ses repères dans la chambre, qui initialement était proposée aux personnes venant en séjour temporaire, l’a conservé lorsqu’il est venu vivre à CD. L’oncle de Reine A. à quant à lui été accompagné pendant onze années en CHSLD, trois à quatre fois par semaine par des intervenants de CD, ce qui lui permettait de bénéficier d’une présence bienveillante supplémentaire et apportait plus de sérénité à sa famille.

L’approche Carpe Diem, basée sur les capacités des personnes dans le respect de leur identité
Repris lors de plusieurs témoignages, l’importance que l’approche soit centrée sur les capacités de la personne et non sur les déficits. Le sentiment d’être utile en participant pour les personnes qui le souhaitent à la préparation des repas, l’entretien du linge, arroser les fleurs, ou bricoler… Ainsi Mme M. est restée dix années à Carpe Diem, ancienne gouvernante, il était primordial pour elle de continuer à préparer les repas, repasser les vêtements, « être utile » aux autres. Sa fille évoque une prise en soin réconfortante, offrant les moyens à sa mère de faire des choses qu’elle aimait, allant « le plus loin possible pour l’aider ». Monsieur E. avait lui l’habitude de se coucher tard le soir, écoutait de la musique classique et appréciait particulièrement Bach, autant de rituels conservés et soutenus. Sa famille a pris conscience de la grande souplesse de l’équipe quand elle a remarqué aucune restriction concernant l’accueil de l’entourage à la maison CD (24h/24) : Monsieur E. était libre de recevoir quand il le souhaitait puisqu’il était « chez lui ».  Un des principes de Carpe Diem est d’accueillir la personnes et sa famille…même si ce n'est pas chez lui…

Risquer la vie
Les familles sont évidemment informées des prises de risque que suppose le quotidien dans une maison où la cuisinière est libre d’accès, où on utilise des couteaux de cuisine pour découper des légumes, où deux escaliers permettent de circuler du 1er étage au rez-de-chaussée, où les résidents sont libres de sortir. La prise de risque est évidemment évaluée et validée par l’entourage et l'équipe. Une attention particulière est portée à la sécurité sans pour autant « sacrifier la vie aux règles ».  La fille d’un résident précise la nécessité de prendre des risques pour préserver une certaine qualité de vie.

De la transition de la Maison Carpe Diem au Centre d’Hébergement et de Soins Longue Durée
Mme D. est restée 15 mois en hébergement à CD puis elle est entrée en CHSLD… La transition d’une structure aussi souple que CD vers un milieu de vie plus grand et au fonctionnement nécessairement plus rigide nous paraissait bien délicate. Pourtant de l’avis de son conjoint, celle-ci s’est fait pour le mieux, sans précipitation, avec l'accompagnement de la même intervenante présente depuis les débuts, pour préparer cette phase tant dans le soutien de l’entourage, que par la transmission des informations permettant une prise en soin la plus ajustée pour Mme D.
Chaque proche rencontré a parlé de la nécessité de soutenir l’équipe de CD pour obtenir les fonds nécessaires à l’ouverture d’une deuxième maison dans le prolongement de la première qui permettrait d’accompagner jusqu’au bout de la vie.
Entretien avec Nicole Poirier à propos de la deuxième maison Carpe Diem

 

De l’engagement des familles
L’engagement de certaines familles est à l’image de celui de l’équipe d’intervenants : militant. C’est ainsi que Monsieur D. est devenu membre de la Fondation pour aider à la recherche de fonds bien que son épouse ait quitté CD en 2005. Reine A. en accompagnant son oncle dans un centre d’hébergement a milité et lancé une grande pétition qui a été par la suite déposée à l’Assemblée Nationale pour favoriser la diminution des contentions physiques et mentales non justifiées. Chantal G. a rejoint le conseil d’administration de CD dès les premières années, son engagement s’est prolongé en intégrant également le comité des familles dans le CHSLD dans lequel vivait sa mère, comité qui a été à l’initiative d’une importante collecte de fonds pour aménager le jardin du centre d’hébergement (cf. témoignage vidéo plus haut).

Au débat fin de vie & dignité
L’actualité estivale du Québec, c’est aussi cette motion votée par l’Assemblée Nationale instituant une commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité. Chargée de produire un rapport à l’Assemblée Nationale, cette commission a entendu des experts afin de produire un document de réflexion et de convier la population québécoise à s’exprimer sur ce sujet lors d’audiences publiques à l’automne 2010. Ce document est déconcertant tant il est orienté… (prochain article sur ce sujet)
Pour certains proches l’émergence de cette consultation reflète la visée purement économique des soins proposés en fin de vie, une manière de réduire les coûts et d’abréger la vie des plus vulnérables sans se préoccuper d’offrir des conditions ajustées aux situations de fragilité de fin de vie. « Légaliser le suicide assisté et/ou l’euthanasie risquerait d’ouvrir la porte à beaucoup d'abus ».

Avec tous nos remerciements aux familles rencontrées pour leur précieux témoignage !

Et puis retrouvez aussi: 
Réflexion d'Amédée-Pierre Lachal: De la complexité du rôle de l’aidant, des aidants dans la maladie d'Alzheimer et troubles apparentés

 

 

 

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